mardi 24 mai 2016

Surprise 16 - Les mouchoirs de Mozart et de Schubert


Dans le film de Bertrand Blier, Préparez vos mouchoirs, sorti en 1977, il est question de Mozart. Il n’est même question que de lui. Le personnage de Stéphane – incarné par Patrick Dewaere –, outre qu’il abrite chez lui la collection complète du Livre de Poche et en connaît le catalogue par cœur, à tel point qu’il peut citer le titre et l’auteur d’un ouvrage à partir de son seul numéro d’ordre, avoue à Raoul – incarné par Gérard Depardieu – : « C’est bien simple, avant de te connaître, Mozart était mon seul pote ».
      
Lorsqu’apparaît dans l’histoire l’adolescent surdoué au charme duquel va succomber la dépressive Solange – interprétée par Carole Laure – Mozart n’est plus le musicien unique. Christian Beloeil, Mozart à sa façon, QI de 158, dit lui préférer Schubert – s’opposant en cela à son père, inconditionnel de Wagner, et se plaçant du côté de sa mère, pianiste.



      
La dernière scène du film nous montre une Solange enceinte des œuvres de l’adolescent – que l’on voit jouer au billard, jeu dont le vocabulaire associé est grandement sexué – tandis que Raoul et Stéphane – le mari et l’amant – sont rejetés hors de l’histoire, cramponnés aux grilles de la maison de maître, spectateurs d’un plaisir et d’un bonheur que ni l’un ni l’autre n’ont su procurer à la femme aimée. La musique que l’on entend durant cette scène est la Mélodie hongroise de Schubert. Parfaitement désemparé, Stéphane ne peut que s’écrier : « C’est pas de Mozart, ça ! »
      
Le générique, ensuite, défile en silence. Depuis le mot attribué à Sacha Guitry, on sait, on sent, on ressent, que le silence qui suit la musique de Mozart est encore du Mozart. En clin d’œil, sans doute passé inaperçu, Bertrand Blier s’amuse avec la sentence : le silence qui suit Schubert, ici, est encore de Schubert.