Affichage des articles dont le libellé est Garcia Tristan. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Garcia Tristan. Afficher tous les articles

jeudi 24 janvier 2019

Âmes de Tristan Garcia


Tristan Garcia, Âmes, Histoire de la souffrance I, éd. Gallimard, 720 pages.

En littérature, l’ambition est une vertu cardinale. Le véritable écrivain est, à coup sûr, celui qui porte un projet d’envergure et le mène à son terme. Mais quel projet ? L’aventure de soi, ou un moment embrassé et rebrassé de l’Histoire, ou bien encore un embarquement dans la langue même. Le véritable écrivain est porteur d’une œuvre, qu’il déploie à son rythme, et qui apporte sa pierre à l’édifice de la compréhension de l’humain. Tristan Garcia est un véritable écrivain. Jeune encore, de formation philosophique et normalienne, il nous offre en ce mois de janvier 2019 le premier volet de son grand œuvre. On connaît déjà de lui des romans, des essais philosophiques, des réflexions sur les séries TV. On décèle chez lui une certaine mélancolie.  Sa voix douce, sans affèterie, sait dire et partager. Il se revendiquait, jusqu’à ces derniers temps, comme un écrivain de l’écriture et non du style. Avec Âmes, le premier volet de sa trilogie sur l’histoire de la souffrance, il franchit un cap.





samedi 28 mai 2016

Tristan Garcia : la mélancolie, le style et l’écriture



Tristan Garcia est venu rencontrer, à la médiathèque de Saint-Priest (Rhône), les lycéens qui avaient lu En l’absence de classement final,et qui avaient publié dans la presse locale un article sur ce recueil de nouvelles. Dès le début du dialogue, la question de la mélancolie est abordée. « Je ne pense pas que je sois vraiment mélancolique, c’est la littérature qui est mélancolique ». Et Garcia de poursuivre sur le travail de l’écrivain. Ses livres, il les envisage toujours à partir de la fin, parce que la place de l’écrivain est dans « l’après ». Raconter une journée, c’est se placer au crépuscule – et c’est bien au crépuscule que la mélancolie est la plus prégnante. Tristan Garcia préfère les formes tragiques, et les histoires qui finissent mal. Un livre qui donne de l’espoir n’est pas satisfaisant. Si tout se passe bien en littérature, comment avoir envie de lutter dans la vie ? Mais si le mal est à l’œuvre dans le livre, alors le sursaut dans la vie est la seule voie possible, et pencher vers le bien la seule option. Ce raisonnement n’a que l’apparence du paradoxe. Les lycéens se regardent, haussent les sourcils, s’interrogent.

Lire l'article sur La Règle du Jeu


mercredi 27 avril 2016

En l'absence de classement final de Tristan Garcia


L'article (sous contrainte : nombre limité de caractères...) que les élèves de 1ES3 du lycée où je sévis ont rédigé, durant une séance de réflexion que j'ai animée, autour de la notion de critique littéraire.
Article paru dans Lyon Plus, le mardi 26 avril 2016, dans le cadre du partenariat avec les Assises Internationales du Roman (AIR).

Merci à leur professeur de Lettres, Sylvie Marxer, pour sa confiance et sa gentillesse.



samedi 15 août 2015

7 de Tristan Garcia



Tristan Garcia, 7, roman, éd. Gallimard, 576 pages, 20 août 2015.

Le titre est un chiffre, écrit comme un chiffre : 7, et non Sept. Le titre du nouveau roman de Tristan Garcia est le chiffre magique 7, celui qui jalonne nos contes de fées (les bottes de sept lieues, Blanche-Neige et les sept nains) et nos lectures de jeunesse (Tintin et ses 7 boules de cristal), celui qui régit notre temps (les sept jours de la semaine) et balise notre culture occidentale (les sept merveilles du monde, les sept péchés  capitaux, les sept couleurs de l’arc-en-ciel). Ce ne sont que quelques exemples. Intituler un roman 7 n’est pas anodin. Le titre promet une trame serrée et une construction rigoureuse. Promesses tenues.

Lire l'article en entier sur La Règle du Jeu

mercredi 14 mai 2014

Les Cordelettes de Browser de Tristan Garcia


Tristan Garcia, Les Cordelettes de Browser, Denoël (2012) et Folio (avril 2014)

David Hale Browser est lâché dans l’espace à bord d’un vaisseau en forme de long serpent. Il est le dernier des « borneurs », ces hommes à qui il a été demandé d’aller au plus loin de l’univers, de le fermer, afin d’en ouvrir un autre. Browser est seul dans son vaisseau. Il s’ennuie à peine, il est au-delà de l’espace imaginable. Il pense à la jeune fille dont il était amoureux, au lycée. Il ne parvient pas à se souvenir de son nom. Cela l’obsède. Et puis, Browser parvient au bord de la Frange, passe son bras dans une faille minuscule. « David parvint à en extraire une grande caisse légère, une sorte de cercueil ou plus exactement de placard, qui flotta à ses côtés. De l’autre main, David tira une caisse plus petite, qui lui fit penser à une console de bois ». David Hale Browser vient d’arrêter le temps.

Le placard, c’est le néant. La console renferme une myriade de cordelettes que l’on noue et dénoue. Chaque humain possède sa propre console. Au gré des nœuds qu’il fait et défait, il peut revivre une scène particulière de sa vie. Parce que le temps, plus qu’arrêté, est figé. On vit dans une éternité où l’on ne vieillit pas, où les saisons ne passent pas, où ni les femmes et les hommes, ni les fleurs et les fruits, ne fanent, ne flétrissent. Et l’éternité, on le sait, c’est long, surtout vers la fin.

Dans la première partie du roman, les chapitres s’enchaînent comme des nouvelles, presque indépendantes les unes des autres. Ce sont des morceaux d’existence de quelques personnages, qui ne se croisent pas. On y découvre le Chalet de l’État, qui abrite le placard que Browser a découvert, et dont la porte ouverte débouche sur le néant. On fait la connaissance de Viv, qui essaie de remonter une scène de son enfance comme on monte un film, en coupant, en collant. On y côtoie Anita qui travaille sur un étrange chantier : il a été décidé de creuser deux puits, de part et d’autre de la planète, et d’effectuer la jonction au centre de la terre. Anita est chargée de la dernière manœuvre, tourner une vis. Mais dans quel sens la tourner ? Le sens des aiguilles d’une montre ? Le sens contraire ? Une montre… dans un monde où le temps n’a plus cours… Cet épisode est un rêve d’Anita, un moment d’imagination pour… passer le temps. Pourtant, la jeune fille va bel et bien rencontrer l’ouvrier tunnelier qu’elle devait rejoindre, dans son rêve, au centre de la terre. C’est ce couple « originel » qui va reprendre les choses en main lorsque l’éternité prendra fin. La deuxième partie du roman, son second versant, est fait de luttes amoureuses et politiques, de résistance et de combats. De vieillesse et de mort. Le temps reprend ses droits, et avec lui reprend le cours de l’Histoire.

Voilà sans doute un roman plus symbolique que se rattachant strictement à la science-fiction. Plus fable philosophique que kitcherie d’anticipation. Tristan Garcia puise à plusieurs sources en les détournant, en leur rendant hommage. On songe à Solaris, à l’univers de Bradbury ou de Vonnegut. La couleur joue un grand rôle dans la narration, qu’elle évoque les tableaux de Hockney ou qu’elle se concentre sur le rouge dans les vêtements de la deuxième partie. Le redémarrage du temps est comme une course accélérée de l’Histoire, il faut réapprendre à allumer un feu, un enfant est élevé par une ourse, on revit l’esclavage, le travail dans les forges…

*


En mai 2013, les élèves de Première Littéraire du lycée Condorcet (Rhône) ont lu les Cordelettes de Browser et se sont essayés à l'écriture collective d'un article pour le quotidien Lyon Plus, dans un atelier d'écriture que j'ai co-animé avec leur professeur de Lettres, Anne-Marie Baglioni. Ils ont ensuite rencontré Tristan Garcia et assisté à la table ronde à laquelle il participait lors des Assises Internationales du Roman (Lyon).