François Coupry, Le Fou-rire de Jésus, suivi de Je
suis mon propre père,
diptyque, éditions Grand West, avril 2016, 260 pages.
François Coupry a encore
frappé. Il publie ces jours-ci un diptyque, deux novellas aux titres insolites
et provocateurs, réunies sous une couverture noire et une jaquette rouge
illustrées du saint suaire de Turin. Deux personnages sont au centre d’un
maelström fictionnel, l’un universellement connu – Jésus – et l’autre suivant
une pente christique décalée – Octavien Hart.
Jésus a une histoire –
sainte. Octavien Hart a une histoire – collective. Personnage de fiction, il
est né de plusieurs imaginaires. Amis de longue ou fraîche date, sept (huit) écrivains
ont élaboré des personnages et des situations que Coupry a retissés à sa
manière, sans se trahir ni les trahir. Ces écrivains (1) ont posé les bases d’un
récit dont Coupry s’est à dessein retiré – le personnage dont il avait la
charge, dans le collectif, a été sacrifié – pour mieux s’emparer du tout.
J’ai, d’une certaine
manière, ma part de responsabilité dans cette publication. J’ai travaillé avec
Coupry sur les différentes moutures du manuscrit de Je suis mon propre père, et j’ai rédigé la postface du diptyque. On
comprendra donc que je ne puisse en faire la critique ni la chronique…
Dans ma postface, je
qualifie François Coupry d’ « ogre baroque ». Il semble que son œuvre
s’ingénie à mêler le haut et le bas, l’envers et l’endroit, la profusion, la
courbe et le reflet. Dans les deux textes de ce diptyque, on rajeunit au lieu
de vieillir, on ressuscite au lieu de pourrir, on est manipulé quand on croit
gouverner, on aime sans s’en rendre compte et l’on sauve en organisant le
chaos.
François Coupry n’est pas
un manipulateur, il est trop intègre, ou trop désintéressé pour cela. C’est un inventeur.
Au sens où l’on commande aux caravelles et aux frères Pinzón pour s’en aller
découvrir un continent inconnu. La route que trace Coupry est un itinéraire bariolé,
foutraque et diablement littéraire. Un itinéraire tracé de longue date, suivi
attentivement et consciencieusement, à l’écart des grandes voies balisées par
les publications contemporaines. Son œuvre, il la bâtit en explorateur, loin de
la facilité. Il est l’organisateur de son propre portulan. Mais cette œuvre, il
la bâtit aussi en connivence, près de ceux qui croient aux forces de l’imaginaire.
Et moi, à ces forces-là, j’y crois.
*
(1) Francis Berthelot, Jean
Claude Bologne, Georges-Olivier Châteaureynaud, Fabrice Colin, Mélanie Fazi, Sylvain
Jouty et Marc Petit. Et François Coupry, bien sûr.