Il n’y a pas de hasard, il
n’y a que des rendez-vous. Si la phrase est vraie – et jamais il ne me
viendrait à l’idée de mettre en doute la parole d’un poète –, alors je suis en
train de vivre une drôle de période question RDV…
La grippe me tombe dessus –
littéralement – lundi soir. Je rentre péniblement chez moi après une belle
journée de travail et de réunions diverses. Le soir, j’ai prévu d’avancer dans
la lecture des Disparus de Mapleton
de Tom Perrotta. Il faut préciser que j’avais, ce lundi-là, deux ouvrages en
lecture parallèle, le second étant Les
Luminaires d’Eleanor Catton. Les
Luminaires est un roman très long (992 pages). Les Disparus de Mapleton me semblait pouvoir s’intercaler sans
dommage dans la lecture au long cours du roman néo-zélandais.
La grippe, surtout à ses
débuts, est assez exigeante : il s’agit, d’abord et surtout, de maîtriser
des muscles douloureux, de juguler une fièvre capricieuse, et de nourrir de
toute urgence un corps qui réclame une pitance ogresque, ou à peu près. Les
tribulations des habitants de Mapleton soudain m’ennuient, ne parviennent pas à
me faire oublier que, bon, oui, quoi… je suis malade.
Trois jours sur le flanc,
la grippe s’éloigne tandis que la pneumopathie pointe le bout de sa toux
d’enfer. Lessivée. La toux la toux la toux.
Et voilà qu’arrive dans ma
boîte aux lettres Mr Mercedes de
Stephen King. Mon sauveur ! Rien de tel qu’un bon King pour terrasser la
pneumomachin, hein ? King l’a toujours emporté sur tout, question
divertissement – prenons ce mot dans son bon sens. Pas cette fois. Ah !
que n’ai-je attrapé la grippe et subi sa pneumotruc corollaire à la sortie de 22/11/63 ! Là, j’étais guérie sur
l’heure ! Mr Mercedes n’est pas
à la hauteur.
Je ne lis, habituellement,
que de la littérature française. La grippe de la lectrice avait rendez-vous
avec trois romans étrangers. Ce hasard-là était à peu près improbable. La
maladie tend à te faire envisager le monde sous un angle pour le moins hostile.
Que les trois romans en cours de lecture traitent de meurtres, de naufrages et
d’apparitions de fantômes (Les Luminaires) ;
de la disparition soudaine et inexpliquée de 2% de la population mondiale et
des conséquences psychologiques qui s’en suivent (Les Disparus de Mapleton) ; d’un serial-killer post 9-11 armé
d’une berline allemande et d’un flic à la retraite au bord du suicide (Mr Mercedes) ne tient ni du hasard ni du
rendez-vous. Tient, plutôt, de la mauvaise blague. Combattre le mal par le mal
est le proverbe le plus ringard que je connaisse.
Je laisse donc de côté,
jusqu’à complète guérison, et sans doute un peu plus, ces trois romans
délétères.
Et m’en vais choisir, parmi
mes livres-compagnons de toujours, celui qui me conduira doucement, tendrement,
vers des jours meilleurs.