mercredi 16 janvier 2019

Tropique du Splendid de Warren Lambert


Warren Lambert, Tropique du Splendid, essai sur la France des Bronzés, éd. LettMotif, 14 janvier 2019, 140 pages.


Le cinéma populaire français de la fin des années 70 et de l’entière décennie 80 repose tout entier ou presque sur une troupe d’acteurs de café-théâtre dont les membres les plus connus sont Christian Clavier, Thierry Lhermite, Michel Blanc et Gérard Jugnot. Les femmes, Marie-Anne Chazel et Josiane Balasko par exemple, font pâle figure à côté d’eux. C’est du moins ce que Warren Lambert expose dans sa thèse, entre autres.
 
La troupe du Splendid, s’emploie-t-il à démontrer, et c’est là le cœur de son essai, a réussi à transformer l’humour subversif de Hara-Kiri en révolution conservatrice. De l’affiche de la pièce Le Père Noël est une ordure, dessinée par Reiser, au dernier volet des Bronzés, une flèche de conservatisme et de libéralisme est dévoilée. Clavier et Lhermite en prennent pour leur grade, tandis que Blanc et Jugnot – les deux moustachus qui ont rasé leur moustache en même temps, les deux acteurs dont la présence sur scène ou sur l’écran n’est pas due à leur aura physique – sont traités plus subtilement, sans doute parce qu’ils sont passés de l’autre côté de la caméra. Les avatars de Lhermite et Clavier – Popeye et Jacquouille – en arrivent à se confondre avec les acteurs, tandis que Monsieur Batignole, réalisé par Jugnot, est analysé à l’aune du contre-pied à Papy fait de la résistance, et Grosse Fatigue, de Blanc, envisagé comme la mise à plat de l’effacement volontaire de son auteur et réalisateur de la troupe du Splendid.

Tropique du Splendid est un essai politique qui, par le biais du cinéma, envisage notre contemporanéité française. Le fil conducteur de la réflexion de Lambert semble être le film Le Locataire de Polanski, adapté du roman Le Locataire chimérique de Topor. Il faut relire ce texte, et revoir ce film : ils disent quelque chose de l’Histoire de France. Comme dit quelque chose de l’Histoire de France, ou tout au moins de l’histoire des Français, le personnage de Monsieur Preskovitch dans Le Père Noël est une ordure.