Warren Lambert, Tropique du Splendid, essai sur la France des Bronzés, éd. LettMotif, 14 janvier 2019, 140
pages.
Le cinéma
populaire français de la fin des années 70 et de l’entière décennie 80 repose tout
entier ou presque sur une troupe d’acteurs de café-théâtre dont les membres les
plus connus sont Christian Clavier, Thierry Lhermite, Michel Blanc et Gérard
Jugnot. Les femmes, Marie-Anne Chazel et Josiane Balasko par exemple, font pâle
figure à côté d’eux. C’est du moins ce que Warren Lambert expose dans sa thèse,
entre autres.
La troupe du
Splendid, s’emploie-t-il à démontrer, et c’est là le cœur de son essai, a réussi
à transformer l’humour subversif de Hara-Kiri
en révolution conservatrice. De l’affiche de la pièce Le Père Noël est une ordure, dessinée par Reiser, au dernier volet
des Bronzés, une flèche de conservatisme et de libéralisme est dévoilée.
Clavier et Lhermite en prennent pour leur grade, tandis que Blanc et Jugnot –
les deux moustachus qui ont rasé leur moustache en même temps, les deux acteurs
dont la présence sur scène ou sur l’écran n’est pas due à leur aura physique –
sont traités plus subtilement, sans doute parce qu’ils sont passés de l’autre
côté de la caméra. Les avatars de Lhermite et Clavier – Popeye et Jacquouille –
en arrivent à se confondre avec les acteurs, tandis que Monsieur Batignole, réalisé par Jugnot, est analysé à l’aune du
contre-pied à Papy fait de la résistance,
et Grosse Fatigue, de Blanc, envisagé
comme la mise à plat de l’effacement volontaire de son auteur et réalisateur de
la troupe du Splendid.
Tropique du Splendid
est un essai politique qui, par le biais du cinéma, envisage notre
contemporanéité française. Le fil conducteur de la réflexion de Lambert semble
être le film Le Locataire de
Polanski, adapté du roman Le Locataire
chimérique de Topor. Il faut relire ce texte, et revoir ce film : ils
disent quelque chose de l’Histoire de France. Comme dit quelque chose de
l’Histoire de France, ou tout au moins de l’histoire des Français, le
personnage de Monsieur Preskovitch dans Le
Père Noël est une ordure.