Vincent Delecroix, Ascension,
éd. Gallimard, 24 août 2017, 640 pages.
L’époque est à la religion, on pourrait difficilement
le nier. A la religion prise au sérieux ; à la croyance remise, dans notre
société laïque, au cœur d’un débat que l’on croyait clos depuis un bon bout de
temps. L’époque n’est pas à la picaresque, et si du point de vue littéraire – dans
le domaine français notamment – l’imaginaire a repris quelques droits, le ton
des romans est souvent convenu, peu inventif, et les auteurs comme sur la
défensive. Vincent Delecroix, avec Ascension,
fait figure, en cette rentrée 2017, de ludion magnifique. Il ne prend pas pour
sujet la religion en elle-même, ni – surtout pas ! – la religiosité ou la
dévotion, mais plutôt le renoncement d’un dieu à sa mission divine, d’un Messie
à sa mission messianique. Il ne place pas son lecteur au cœur d’un débat
convenu, il l’entraîne sur des chemins dostoïevskiens. Il ne reste pas au ras
des pâquerettes, il nous transporte dans l’espace. Lequel espace, soit dit en
passant, n’est pas le Ciel mais quand même un peu, et c’est là sans doute la
base avérée de ce roman foutraque et roboratif, de ce gros roman de plus de 600
pages qui se dévore et se savoure à la fois, qui alterne les moments de pur
récit historique ou réaliste avec des dialogues présentés comme sur un script
et des plages de réflexion métaphysique.