jeudi 22 août 2019

Orléans de Yann Moix


Yann Moix, Orléans, éd. Grasset, 21 août 2019, 272 pages.


Orléans n’est pas une ville. C’est le lieu du massacre des innocents. Dans le terrible et magnifique récit que Yann Moix publie en cette rentrée, la ville tient, au fond, très peu de place. C’est la province, endormie, engoncée, celle des années 70-80, mais elle est comme hors du temps. On est en milieu bourgeois : le père est médecin, la mère au foyer, mais ce mot de « foyer », qui devrait évoquer la douceur et la chaleur, est ici synonyme d’enfer. C’est le foyer du diable, et Orléans la capitale de la douleur.

Il y a quelques années, Moix publiait un roman-monstre, baroquissime, intitulé Naissance. Il y mettait en musique son enfance – entendons par là que le roman était une sorte d’opéra-bouffe dans lequel l’hyperbole et l’invraisemblable enserraient comme dans une gangue la vérité la plus prégnante : celle de l’enfant battu. Si Naissance est la mise en scène hallucinée de la vérité, Orléans est le récit organisé des années d’école, de collège, de lycée et de classe préparatoire. Un roman, donc. Structuré au cordeau, conçu comme en miroir : deux parties égales, intitulées « Dedans » et « Dehors », avec les mêmes en-têtes de chapitres pour les deux parties, reprenant simplement – non, ce n’est pas simple, c’est plutôt fracassant d’exactitude – les niveaux des classes. On balaie ainsi le spectre complet de la scolarité, de la Maternelle aux Mathématiques Spéciales, par deux fois, dans l’ordre. Cet ordre-là, bien ordonné, stable, immuable, a quelque chose de rassurant. On est un enfant, puis un adolescent, puis un jeune homme. Et l’on est à Orléans. Et l’on vit chez ses parents. Et l’on va à l’école.