Hisham Matar, Un mois à Sienne, éd. Gallimard, avril 2021, 144 p.
L’édition Gallimard propose des illustrations. Voilà un plus indéniable pour le lecteur qui ignorerait tout, par exemple, des fresques de Lorenzetti sur les effets du bon et du mauvais gouvernement. Hisham Matar scrute chaque détail, et ce qu’il découvre et analyse, nous le découvrons et l’analysons avec lui.
L’auteur, avec une sincérité poignante, écrit aussi sur la disparition de son père qui était l’objet de sa précédente publication, et sur l’amour qu’il porte à son épouse. Matar nous montre, avec empathie, comment une ville, avec son histoire et son art spécifique, peut aussi, d’une certaine manière, veiller sur nous, et nous sauver.
Sienne est une ville que je connais bien, très bien même. J’y ai passé, durant des années, des séjours éblouis, et j’en ai fait le décor de quelques-uns de mes textes de fiction. Je me souviens que, rituellement, A.-M.V. (l’amie qui m’accompagnait dans mes tribulations toscanes) et moi nous nous asseyions sur le banc qui fait face au Guidoriccio da Fogliano de Simone Martini, et que nous détaillions l’œil rigolard ou blasé du cheval – notre appréciation variait selon les jours –, le contraste impeccable du bleu nuit et du jaune sable, et tout ça, et tout ça, et qu’ensuite venait l’heure de nous installer à la terrasse de Manganelli, sur la piazza del campo, pour voir tourner tout doucement l’unique aiguille de l’horloge de la torre del Mangia.
La Sienne d’Hisham Matar diffère légèrement de la mienne, et, pourtant, elle est la même Sienne, prenante, prégnante, fascinante et amicale. Matar nous convie à partager un parcours loin du tourisme de surface, tout en exploration vive et en retour sur soi. Un récit magnifique, dans lequel le lecteur se sent accueilli en ami.