Marisha Pessl, Intérieur nuit (Night film), traduit de l’anglais (USA) par Clément Baude, Gallimard, août 2015, et éd. Folio, mai 2017.
Pourquoi relire ? Je relis souvent, depuis toujours. Ce n’est donc pas un signe de vieillesse. Revoir des films, ce n’est pas la même chose, l’investissement est moindre. Relire, c’est re-voler du temps à la contingence. Je m’aperçois que je relis des romans longs, des « pavés ». Toujours ce rapport au temps, sans doute.
Ce tout petit billet n’a que peu d’intérêt. Peut-être celui, tout de même, de rallonger la liste des correspondances entre les textes : si le fameux épisode de soixante-dix pages de Intérieur nuit me renvoie toujours au « Rapport sur les aveugles », cette partie centrale du roman Sobre héroes y tumbas de Sábato, le roman de Marisha Pessl m’a aussi fait penser à Notre part de nuit de Mariana Enríquez. Notons que dans ces trois romans, le cœur du sujet, c’est bien la relation père/enfant. Loin de la tragédie, de la faute des pères retombant sur les enfants, ces trois romans explorent, par le biais de la magie noire et-ou de la paranoïa, une part de la psyché inaccessible à la simple réduction au psychologique. Passer par l’explication magique, en littérature, ce n’est pas renoncer fondamentalement au rationnel, c’est emprunter des chemins plus obscurs pour déboucher sur des vérités simplement humaines. En littérature, hein. C’est-à-dire sur le plan symbolique, métaphorique. Ne me fais pas dire ce que je n’ai pas écrit… La magie dans la vraie vie, c’est de l’intox. Dans la vraie vie, il faut raison garder. La vertu de la littérature c’est la transmutation. Car c’est dans la littérature que la magie opère.